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Sine linea
23 août 2011

"Quand on sait marcher au plafond"

     Des années que je tourne autour de lui. J'hésite même à lui proposer de réaliser un portrait de lui en vidéo après celui que je termine cet été sur un autre écrivain.

     Pourtant j'ai du mal avec son écriture toujours distanciée, ironique, sauvage, maligne, tonnante pour être belle...

     Son deuxième roman Le Démarcheur, je n'ai jamais réussi à le finir même si j'aime beaucoup ses phrases ciselées et son ton. C'est comme quand je lis Blanchot, il est doué, ça sent bon l'intelligence, mais je ne parviens pas à le lire, ça manque de vie en fait.

     La première fois que j'en avais entendu parler, c'était par cette amie Elsa, dont vous avez pu lire mes vieux poèmes d'adoration pendant plus d'un mois sur ce blog. Son petit ami de l'époque, appelons-le K, était fan de cet écrivain. Il avait même tendance à calquer son écriture et sa pensée sur lui. Ce devait être en 1993 ou approchant. K et moi échangions une étrange et finalement courte correspondance autour de la littérature et d'Elsa, notre médiatrice. C'est dans ses missives qu'il a dû aborder l'existence et la douance de cet écrivain. K aimait aussi beaucoup Michaux, c'était là notre seul point commun, car il refusait toute la littérature qui n'était point ironique, réflexive et critique. Moi non, les laborieux, ceux qui croient à la démarche suffisante de raconter une histoire pour distraire faisaient également partie de mon panthéon.

     J'aimais bien côtoyer ce K, amoureux de celle que je pensais aimer, intransigeant avec les littérateurs, moqueur et libre. Elsa m'avait dit qu'il écrivait des nouvelles, très belles et surprenantes. Si j'avais entamé cette correspondance avec lui, c'était pour le lire naturellement. Mais cela ne se fit pas. Elle m'avait raconté qu'il avait rédigé une histoire loufoque sur des moutons de poussière qui discutaient sous l'armoire. Alors, un jour, je me lançai, je l'abordai de front, lui parlai de son récit de moutons bavards, il m'a regardé, interloqué, il n'avait jamais écrit pareil récit !

     Cette historiette ressemble bien à ce que je pense d'Eric Chevillard, insaisissable, à part, irréel.

     J'avais un peu abandonné l'idée de le lire ce vendéen, mais mon ami d'enfance, celui aux cacahuètes si vous suivez bien ce blog, m'a offert pour ma dernière année de ma trentaine, un très joli livre noir, édité par l'Arbre vengeur en 2011 au titre toujours énigmatique : L'autofictif père et fils.

                                    

          couverture tirée du journal régional de l'étape de l'auteur, Ouest France

     J'y retrouve son art de l'aphorisme absurde et poétique, avec délectation. Je le lis au ralenti, comme la tonalité globale de mon été perdu. Les mots viennent percuter le cuivre de mon cerveau vide, rebondissent alertes vers des horizons incalculés. Ils m'habitent instantanément.

"Quelqu'un a-t-il déjà vu un ver entrer dans une pomme ? Je suis à la recherche de témoignages pour un livre."

     Ou bien le si tendre:

"Plusieurs centaines de kilomètres nous séparent, mais je me dis que parfois, à la faveur d'un pas de côté que nous faisons chacun innocemment, elle dans sa chambre peut-être et moi dans la mienne, nous nous rapprochons un peu l'un de l'autre, et si nous n'en sommes pas encore à nous toucher, à nous enlacer, ni dans sa chambre ni dans la mienne, insensiblement la distance entre nous s'est réduite - et j'en tremble (puis elle s'éclipse quelques instants dans sa salle de bains)."

     Sur internet, notre Eric Chevillard se taille une belle part des sites à citations.

"Je hais les mouches, leur vol est une aberration, une dérision du vol - à quoi bon voler, d'ailleurs, quand on sait marcher au plafond ?" (Le Vaillant petit tailleur, 2004)

     C'est dit, je vais faire un effort, je vais lire et relire Eric Chevillard ! Et vous ?

Je hais les mouches, leur vol est une aberration, une dérision du vol - à quoi bon voler, d'ailleurs, quand on sait marcher au plafond?
Le vaillant petit tailleur (2004)


Source : Citations de Eric Chevillard - Dicocitations ™ - citation

Je hais les mouches, leur vol est une aberration, une dérision du vol - à quoi bon voler, d'ailleurs, quand on sait marcher au plafond?
Le vaillant petit tailleur (2004)


Source : Citations de Eric Chevillard - Dicocitations ™ - citation

Je hais les mouches, leur vol est une aberration, une dérision du vol - à quoi bon voler, d'ailleurs, quand on sait marcher au plafond?
Le vaillant petit tailleur (2004)


Source : Citations de Eric Chevillard - Dicocitations ™ - citation

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