trappe muette
Un peu perdu après mon unique heure de travail hier après-midi. Emploi du temps à trous, ridicule voire insultant.
J'ai réglé de l'administratif, deux détails, me gare en ville, regarde les horaires de cinéma à l'abc et entre pour un film hongrois : Adrienne Pál d'Ágnes Kocsis. Mes deux derniers films vus au cinéma ont pour personnage principal une personne obèse, Terri et maintenant ce film improbable, cette infirmière énorme qui survit sans émotion aucune dans le service des soins palliatifs depuis dix-huit ans jusqu'à ce qu'une quête semble lui faire retrouver un goût, une sorte d'allant, enfin... Univers froid, réaliste et en même temps inhumain. Deux heures à suivre ses déambulations et étonnamment, je ne me suis pas ennuyé. Le film se clôt par un zoom avant sur son visage, filmé comme un animal, vivant finalement.
Je sors, récupère mon vélo pour l'emmener chez un collègue pour qu'il regarde s'il est en état de fonctionnement, oui, tout semble bien, on discute, célibat, rencontres, séparation, travail, emploi du temps.
Je sors et trouve trappe muette à la médiathèque. Ne pouvant y laisser mes livres, je me rends chez un ami d'enfance à deux rues et lui laisse les documents. Cacahuètes, pain et fromage composeront mon dîner. On parle, séparation, procédures, limites, écoute, fatigue, travail, rythme...
Un autre ami et collègue m'appelle pour boire une bière, j'accepte, on se retrouve au début de la nuit, deux bières belges très agréables et douces. On parle, couple, femme enceinte, travail, partage, colère, séparation, procédures, décisions.
Je rentre, 23h15, je téléphone à mon amie, journée, travail, rencontres, film, vélo, bières, sentiments, et je me couche.
Je regarde le plafond, j'essaie de comprendre comment ma journée s'est enchaînée. Tout m'étonne, toujours.
Cette année, plutôt que ces heures oisives et ces rencontres fort agréables, il me faudrait m'enfermer, m'enfermer et écrire, enfin. En fait, un jour sur deux me paraît la solution au départ de la rédaction du roman attendu, un jour je vis comme ça, ouvert au monde et l'autre, je me cloître et écris. Quand tout sera lancé, je n'aurai plus le temps de sortir, tout sortira, la fontaine espérée, jouvence, rêve, monde, psychologie effarante des morceaux de moi qui jouent à être des personnages.