recueil poétique ; une grande fatigue (5 : mots en bouche)
une grande fatigue
en tête des restes charbonneux
les mots tout juste contenus en bouche
cette impression de reculer
ou plutôt de s'enfoncer
plus de vingt fois
cette impression de m'être délivré des poids
et toujours de nouveaux
combinés aux anciens
viennent comprimer la peau
claire limite tendue sur du vide
et toujours ces lignes brisées
ces quêtes minuscules
jusqu'à l'oubli de la visée
remiser en attendant
de s'habiter un peu davantage
en fixant l'horizon de la disparition
des autres
la nôtre
toujours inscrite
dans chaque pierre tombée
je suis encore là
sans autre surprise que mon souffle
j'ai tout vu
et pourtant je vois encore
je ne fais qu'attendre ce moment
où le monde aura chuté
n'être ni entendu ni lu
aimé un peu de ceux que j'ai nourris
pour un temps encore au-delà du mien
petit temps suffisant pour
que le nid de l'oubli se creuse
quand il seront parents à leur tour