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Sine linea
2 mai 2016

Théo et Hugo dans le même bateau d'Olivier Ducastel et Jacques Martineau : des baiseries mécaniques à l'émergence de l'amour

     A la projection de Théo et Hugo dans le même bateau d'Olivier Ducastel et Jacques Martineau hier soir, en présence des deux réalisateurs, à l'ABC. Moments beaux et en même temps étranges. Les débats étaient trop laudateurs pour que je puisse émettre une critique dans la salle. A la fois touché, à la fois distant. De voir les deux acteurs du film, Goeffrey Couët et François Nambot, en interview m'a réconcilié avec le film aujourd'hui.

     Ce qui me froissait pendant et après le film, dans le désordre :

- esthétique "gros lettrages musique techno déjà vus", trop "genre", marqués ; on pense aux films et aux génériques de Gaspar Noé...

- la longueur de la scène première est-elle là pour plaire, exciter, séduire, réduire ? Les réalisateurs ont cité Patrice Chéreau avec Intimité pour ces corps filmés, je comprends bien, mais l'intérêt pour moi était restreint, pas d'excitation, juste un regard ethnologique sur ces corps réunis. J'ai pensé aussi à la caméra de Bruno Dumont, frontale. Après cette découverte visuelle et sociologique, l'ennui a pu s'installer, comme pendant L'inconnu du lac d'Alain Guiraudie, où les répétitions des plans lassait, tout comme l'intrigue trop maigre. Pensé aussi à l'incongru Change pas de main de Paul Vecchiali que j'avais vu à la cinémathèque, hybride polar et porno (il serait le premier film classé x sous Giscard) ; heureusement hier soir, les réalisateurs nous ont épargné les gros plans de pénétration comme dans ce film de 1975. Je comprends bien l'intention qu'ils ont eu de poser leur caméra dans ce club gay pour montrer que l'amour pouvait même naître dans ce genre de lieu, mais la somme des images et de l'absence de mots pendant plus de vingt minutes m'a fait décrocher (rien d'hypnotisant à tout ça).

- le moment où les deux protagonistes en pleine copulation avec deux hommes se découvrent est réussi, les lèvres se rapprochent, ils se découvrent, mais j'ai été gêné par une transition que j'ai prise pour un flash-back : changement de couleurs, de cadre, les deux personnages semblaient se connaître avant ; c'est ça que je voulais leur dire surtout hier soir, mais je n'en ai pas eu l'occasion ni le courage ; je pense qu'ils ont voulu ainsi marquer le passage des baiseries mécaniques à l'émergence du sentiment amoureux.

- à faire du réalisme autant marqué, on y perd l'intérêt du regard, que ce soit dans le club ou après, dans ce Paris miniature (les spectateurs qui ont trouvé ce Paris beau m'ont très surpris).

- le film m'a semblé trop écrit, un rythme particulier, à la fois proche de Truffaut, Rohmer et Rivette ; il fallait placer les dialogues, certains moments m'ont même paru trop "pédagogiques". L'amie qui m'accompagnait me disait qu'elle savait que ce n'était pas un film de commande mais que ça y ressemblait. Je préfère, malgré mes réticences, un Garrel, père ou fils, et même parfois un Christophe Honoré, pour leur Paris, pour leurs dialogues (je pense au beau Dans Paris, et surtout à Tout contre Léo), même si cela ne me concainc pas toujours.

- le marquage du genre est trop fort ; je ne vais pas voir un film hétéro, homo, gay, lesbien... je suis probablement le seul en France à être allé voir ce film et celui de Guiraudie cité plus haut sans savoir de quoi il en retournait... J'aime être surpris, je n'ai pas besoin de guidage ; je ne pense pas qu'il faille miser comme ils l'ont dit hier soir sur des réseaux, mais plutôt qu'il faille embrasser un public sans distinction.

- débattre après le film sur le peu de films qui ont su représenter le désir m'a semblé très surfait et faux ; dois-je citer tous les réalisateurs et réalisatrices qui m'ont fait trembler d'émotion sur ce thème ? Je vous salue Marie de Godard, Gena Rowlands dans combien de films ? , Parfait amour de Breillat, Cléo de 5 à 7 d'Agnès Varda, Un tramway nommé Désir de Kazan (je tremble encore au souvenir du dos de Brando !), La Femme des sables de Hiroshi Teshigahara, Les Roseaux sauvages, J'embrasse pas, Rendez-vous, de Téchiné, L'ennui de Kahn, tellement encore, des centaines !

     Les lecteurs de ce blog savent bien que je ne critique que ce qui est intéressant à voir, lire... Content au final d'avoir vu ce film et découvert les réalisateurs, que je préférais au-delà du réalisme avec leur très beau Jeanne et le garçon formidable, et d'avoir suivi le jeu de ces deux très bons acteurs, beaux et courageux !

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Commentaires
H
Merci, oui !<br /> <br /> Des bonnes choses dans le Téchiné !<br /> <br /> Qui refoule ses expressions ? Les critiques ? Les médias ?
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S
D'accord avec toi sur la difficulté qu'il y a à émettre un commentaire ou une question qui va à l'encontre du courant dominant. J'ai eu le même sentiment d'expression refoulée à propos du dernier film de Téchiné. Sans compter qu'il est, je trouve, de plus en plus difficile de faire entendre des critiques nuancées...
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Sine linea
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