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Sine linea
10 août 2022

La traversée (été 2021)

La traversée du “griot” 

Hendaye-Banyuls

GR10(t)

 

3. Eté 2021

 

JOUR 33

De Rouze-d'en-bas à Mérens (1/8)

Mercredi 7 juillet 2021

C'est parti pour mon troisième été de traversée des Pyrénées !

La nouveauté, c'est que je marche seul, pas de compagnon de route, la montagne et moi...

De toute façon, on marche toujours seul, deux jambes, un sac, de la fatigue, de grandes joies simples.

Une heure de marche jusqu'à la gare pour m'échauffer, tester le poids de mon sac. Chaleur, dur, alors que c'est plat, qu'on est juste en ville...

J'ai trouvé un bus pour Saint-Girons à 2 euros seulement ! Première nouvelle compliquée : le chauffeur me confirme que je ne trouverai aucun bus pour Couflens en soirée. Restera le stop ou la marche de six heures de nuit pour les 30km sous la pluie...

Le bus arrive à 18h05. Je me protège de la pluie forte, retire de l'argent liquide et cherche la route de Seix. Je suis pris en stop dans les cinq minutes ! Par un professeur de maths de Saint-Girons, grand randonneur qui rédige également des topo-guides des randos dans le Couserans notamment : Cyril R.. Il me conduit bien loin de chez lui très gentiment ! Au lieu du point de départ que j'imaginais, Couflens, il me dépose à Rouze-d'en-Bas, au niveau du gîte d'étape. Il m'a montré sur la carte le chemin à emprunter et une cabane sommaire pour cette première nuit : l'abri du Tuc, à 300 m du Col de la Serre-du-Cot.

Pluie, boue, brume, très heureux d'avoir fait l'acquisition de bâtons pour randonner ! Je trouve la cabane rapidement dans ce brouillard. Je prépare la couche, mes vêtements secs et mange avidement. Cyril m'a vraiment très bien lancé l'aventure : MERCI !

J'espère que personne ne viendra dans la cabane, une seule couche, pas de cheminée... 

Très heureux du départ, pas de douleurs malgré la lourdeur du sac.

21h20 : nuit compliquée avec des petits rongeurs (mulots, souris ?) qui cherchent quoi ? Ma nourriture ? 

Nombreux réveils et délires... 5h49 Finalement, j'ai dû me rendormir puisque j'ai rouvert les yeux à 8h45 ! Soit ces bêtes-là sont essentiellement nocturnes, soit je ne les ai plus entendues…

 

JOUR 34

De Rouze-d'en-bas à Mérens (2/8)

Jeudi 8 juillet

Arrivé à Saint-Lizier-d'Ustou, temps correct. De belles granges retapées dans le coin. Je vais voir si j'ai du réseau et si je trouve du pain.

J'ai rencontré Pierre, on a marché ensemble. 37 ans, professeur d'EPS. On a pris la variante pour Aulus-les-Bains. Mal aux jambes et aux épaules. J'alterne mes chaussures car mes doigts de pied souffrent. Tombé cinq fois, abîmé mon écran de portable mais il fonctionne encore... 7h05, trop pour moi aujourd'hui.

 

JOUR 35

17 juillet 2021

De Rouze-d'en-bas à Mérens (3/8)

Vendredi 9 juillet, 14h34. Arrivé au refuge de Bassiès. Ce matin, je me suis trompé de chemin au départ d'Aulus, pourtant un endroit que je connais ! J'ai perdu pas mal de temps et d'énergie pour rien (1h20). Après, j'ai marché, petit rythme, grand soleil au-dessus des forêts. J'étais parti tôt pourtant (6h30) pour que Pierre me rattrape dans la montée de Coumebière au port de Saleix. Un coureur à pied m'a dit qu'il l'avait vu devant moi à 25 minutes. Je ne l'ai pas revu de la journée. Pas grave. Je me suis baigné au petit étang d'Alate, très agréable pour les muscles des cuisses ravagées. Je bois un sirop au refuge. Une des femmes qui s'occupe du refuge m'a indiqué la route pour Marc, descente pas trop forte d'après elle. 3-4 h suivant ma fatigue. Le sac est trop lourd, il faut que je parte avec moins d'eau et de nourriture ! Mes deux paires de chaussures aussi, aberrant ! 14h40.

19h38. Journée de fou ! Je bois une bière à la terrasse d'un café du village de Marc. Très gentiment le patron de l'énorme village de vacances m'a autorisé à planter ma tente dans son pré. J'ai marché sur un ancien aqueduc pendant plus d'une heure ! Étrange ! Parfait lieu pour tourner un film de science-fiction post-apocalyptique ! Je n'ai pas retrouvé Pierre pour l'instant, je crois bien que je ne le verrai plus. Ce soir, spectacle au bar, si j'y vais, je vais m'endormir ! J'ai dû marcher 10h30, folie !

 

JOUR 36

De Rouze-d'en-bas à Mérens (4/8)

Samedi 10 juillet

La rivière proche de ma tente a entrecoupé mon sommeil à maintes reprises. Plus constante qu'une autoroute... J'ai rêvé entre les réveils, j'ai donc bien dormi.

Levé vers 6h15. A 6h30, j'ai vu passer les trois randonneurs que j'ai croisés plusieurs fois hier. J'ai appris depuis qu'ils se sont croisés sur le GR10 à Saint-Jean-Pied-de-Port et que depuis chaque été, comme moi, ils avancent sur le chemin vers l'est. Le premier, qui marche plus vite que moi, Thierry, a 64 ans. Le second, qui marche comme moi, en a 70, et le troisième, lui, en a 77 ! Ils avalent des journées de fou !

Dans la forêt je les ai rattrapés, au-dessus de Marc, avant le refuge de Prunadière, puis Pierre m'a doublé. Il avait dormi à Mounicou, 15 minutes après Marc. Il a filé dans la descente et je l'ai retrouvé plus loin, au bas de la forêt avant de remonter, à s'étirer. J'ai enfin mangé mon melon que je trimballe depuis le départ, mercredi. Thierry est arrivé à son tour, on a parlé un peu. Pierre est parti pour le l'étang d'Izourt. Puis j'ai repris le chemin, seul, manquant d'eau. A Pradières, un homme m'a indiqué une source d'eau, j'y ai rempli 2 litres. 

La montée depuis la centrale électrique m'a été difficile au début, plus trop d'énergie. Pause, eau, ensuite, en plein soleil pourtant, un peu d'énergie est revenue. A 13h20, j'arrivais à Izourt, bien fatigué. Pierre y était, à l'ombre. Il est vite reparti. Il reste pas mal de route pour atteindre Goulier avant ce soir, où on pourrait dormir si l'on trouve un coin pour la tente. Les douleurs sont là : pieds, muscles des jambes, épaules, mais dans l'ensemble, ça va. Grande pause à l'étang pour moi à l'ombre, proche du barrage. J'ai lavé mes habits puis je me suis savonné, et j'ai nagé un peu. Agréable ! J'ai pris 2 heures de pause avant la dernière difficulté de la journée, "punition" aurait dit mon père...

Après ces 2 heures d'incroyable repos, j'ai repris le GR pour Goulier : contrairement à ce qui était affiché sur site : 2h45, j'ai mis 4h ! Une très longue traversée sur le flanc, assez pittoresque voire dangereuse. Vue sur la vallée quand la brume se dissipait. J'ai rencontré trois randonneurs d'une trentaine d'années : David, Clément et Paul. Ils s'étaient arrêtés, voulant dormir dans un abri semi-naturel, une sorte de grotte aménagée. Finalement, ils ont changé d'avis et m'ont rattrapé assez vite. J'ai tenté de les suivre en vain, bien fatigué. 

Ce fut très long pour arriver au gîte où Pierre était installé. Impossible de planter ma tente dans le jardin du gîte. Pierre a craqué et pris une place dans un dortoir, pour 23 euros, cher quand même pour une étape... Les trois autres ont négocié leur nuitée à 18 euros chacun. Je suis le seul à avoir planté ma tente à l'entrée du GR. J'ai mangé rapidement, assis dans la petite forêt, à côté de ma tente, et je n'ai pas traîné, il n'était pas 21h que j'étais déjà allongé, peu confortablement dans une légère pente.

 

JOUR 37

De Rouze-d'en-bas à Mérens (5/8)

Dimanche 11 juillet

La nuit fut inconfortable, je roulais sur ma droite dans la pente, mais j'ai davantage dormi que les autres nuits tout de même. Réveil mis à 5h45 et je suis parti à 6h23, le plus tôt de mon périple ! Il faisait à peine jour, on y voyait à peine pour démonter et ranger les affaires !

Quiétude du petit matin, chemins aisés, cols très faciles (pourquoi portent-ils le nom de cols ?). Au Risol, j'ai surpris une quinzaine d'izards ! Les petits jouaient à se courser dans la pente au soleil, encadrés des adultes. Puis, dans la forêt vers Esquerus, trois sangliers ont grogné en m'entendant et ont détalé, deux dans un sens et le troisième dans l'autre. Plus loin encore, un coq de bruyère, imposant et bruyant, s'est envolé juste devant moi, noir, magnifique !

J'ai enchaîné les petits cols, Grail, Lercoul et je viens de me poser sur une table et un banc de bois. Je ne trouve plus le GR. Plutôt que de m'énerver, je me dis qu'écrire la fin de la journée d'hier et cette matinée est une bonne idée.

Je vais prendre la route sur la droite, elle doit descendre au village de Lercoul. Pierre n'est toujours pas là, étonnant. 3 heures que je suis parti, il est 9h25 maintenant.

16h50. Pierre m'a rejoint peu de temps après que je finisse de rédiger ma matinée, au col de Lercoul. On est descendus tranquillement à Lercoul puis Siguer. Pierre nous a fait du café à la mairie, on a pu remplir nos gourdes et bouteilles. Petite pause bien venue dans cette chaleur montante. On est passés devant une tablée mise dans la rue pour le petit déjeuner de deux couples. Très copieux ! On a bavé devant Pierre et moi, leur proposant même de leur payer un verre de jus d'orange ou un pain au chocolat ! Rien n'y a fait, ils ont à peine répondu. Et on a entamé la très longue montée au sortir de Siguer pour le col de Sasc, à presque 2000m, chaleur, dénivelé, mouches, taons, très dur !

Pierre est parti devant comme à son habitude, je l'ai retrouvé à l'ombre d'un arbre court, allongé sur le chemin, me disant qu'ici, étrangement, les taons ne venaient plus le harceler. Et on a monté, monté, presque ensemble, moi à une centaine de mètres derrière lui la montagne ronde et interminable. On a refait le plein d'eau au refuge des vachers : deux grandes filles, une femme (leur mère, professeur de mathématiques), un grand-père (?) et un vacher, très barbu.

Nous avons atterri à la cabane Balledreyt. Deux femmes occupent la moitié droite et nous la gauche. Un mulot nous y attendait. Plus d'énergie. On se pose sur les paillasses. Sieste, discussion sur nos vies. Je crois que je parle trop fort et que nos voisines m'ont entendu...

Nous dînons tous les quatre de leur côté du chalet, elles viennent de Casablanca, l'une s'occupe de chevaux et l'autre enseigne.

Marche estimée à 8h30, total depuis le départ : 38h à peu près.

 

JOUR 38

De Rouze-d'en-bas à Mérens (6/8)

Lundi 12 juillet

Journée folle et compliquée ! Bonne nuit à la cabane, j'étais en haut, le rongeur ne m'a pas autant dérangé que ça. Pierre en bas l'a davantage entendu s'affairer dans la nuit. 

Grosse pluie quand nous étions couchés. Les vaches sont venues brouter très tôt, agitant comme des folles leurs cloches ! Brume épaisse au réveil. On a trouvé les marques du GR sans difficulté malgré tout. Mais mystérieusement, nous avons fait une boucle incompréhensible dans le coin de la forêt de Sirmont. Surréaliste ! J'avais perdu mon chapeau sur le chemin et bien plus tard, plus d'une heure après, nous avons retrouvé mon chapeau, comprenant alors qu'on avait rebroussé chemin à un moment ! Déboussolés ! Pierre a pris son téléphone avec son application, nous a sortis de cette impasse, en silence, énervé(s).

J'ai déjeuné ensuite devant la cabane fermée juste avant celle de Clarans sur le banc, sous la pluie, quand Pierre a repris son périple pour le plateau, toujours aussi motivé. J'ai pris une demi-heure, j'en avais besoin. Puis, à bon rythme, dans la forêt trempée, sous la pluie battante, essayant de trouver mon chemin dans la brume, l'absence de marques et les cairns salvateurs, en t-shirt, dégoulinant, j'ai atteint le plateau de Beille, après une courte halte à la cabane d'Artaran, en 2h20. Arrivé tôt au village nordique d'Angaka (vers 15h), j'ai erré dans ce décor brumeux, entre les yourtes et tipis. J'ai crié, personne. Appelé Pierre au téléphone et puis il m'a rappelé : il était dans l'épicerie ouverte, une petite cabane en bois au milieu de cet étrange village, où l'on peut se poser, acheter ce que l'on veut en laissant l'argent dans une petite caisse. Douche, café, jus d'orange, le rêve ! Il dormira dans un tipi. Moi, si j'ai le courage, je planterai ma tente dans l'herbe détrempée... 

Alex, un collègue, vient nous rejoindre ce soir. On décidera où on dormira. On marchera tous les deux, deux jours pour Mérens-les-Vals, quand Pierre le fera en une journée. Les randonneuses de Casablanca sont arrivées plus tard, sous la pluie et le froid, bien fatiguées. Nous étions bien à l'intérieur, au chaud. Isabelle, très sympa, qui gère le lieu, est venue ravitailler l'épicerie. Alex est arrivé après 20h je crois. On a dîné, bu, pris le temps de tout, un luxe de repos encore ! 7h de marche à peu près, mais dur, cette erreur, cette pluie…

 

JOUR 39

De Rouze-d'en-bas à Mérens (7/8)

Mardi 13 juillet

Nuit pleine sous la tente malgré la pluie battante. Alex dormait dans la sienne à côté. Je n'ai pas vu partir Pierre qui nous a laissé un mot très sympa avant son départ. On est partis tranquillement avec Alex vers 10h15 pour le refuge de Rulhe. Froid polaire, pluie pénétrante. Pieds trempés avant de commencer la marche, dur ! Beaucoup de crêtes, pas trop difficiles dans l'ensemble. Petit rythme. Arrivés vers 16h30 au refuge. Brume aléatoire. Très bien accueillis par les hôtes du refuge. Chocolat chaud pour moi et vin rouge pour Alex. J'ai retrouvé les trois randonneurs, Thierry et ses acolytes. Ils ont fait Clarans-Rulhe ce jour. Demain, on sort du GR finalement, lac de Laparan, Rieutort, Didorte et plateau de Beille pour retrouver la voiture, sinon, trop compliqué : Mérens - Les Cabanes en train puis stop jusqu'à la voiture. Je n'aurai pas vu Mérens, mais je connais bien le coin. L'année prochaine, je redémarrerai de là-bas pour avancer vers Banyuls.

On a dîné au refuge, premier luxe de mon séjour, et joué aux cartes jusqu'à tard pour nous randonneurs avec la jeune équipe du refuge. Et dormi sous tente, dans un frais certain. 5h30 de marche, total estimé à 50h30. 

 

JOUR 40

De Rouze-d'en-bas à Mérens (8/8)

Bonne nuit dans l'ensemble sous la tente avec Alex (on avait pris sa double, laissé la mienne dans sa voiture avec quelques affaires). Sommeil entrecoupé comme toujours. On entendait des feux d'artifice dans la vallée avant minuit, où ?

On a salué, réglé nos hôtes et on s'est engagés un peu au hasard vers Laparan. On a dû se taper une pente importante hors sentier pour descendre vers le lac, jambes fouettées, du sang, ça réveille. Alex a mal à un genou dans la descente, moi, j'y vais doucement aussi, dernier jour...

On a déjeuné pas loin du lac et on a pris à droite, sans chemin vraiment tracé vers le Rieutort. Dure montée, retrouvé un chemin montant fort, une sente pour brebis aussi. Et on a retrouvé au col de la Didorte les deux randonneuses qui avaient pris un jour de repos la veille pour monter à Rulhe. On a déjeuné dans l'herbe, le soleil ayant enfin fait une percée conséquente. Un randonneur a discuté avec nous pendant un quart d'heure, et on est repartis, petit rythme sur la fin des crêtes et les chemins des pistes de fond vers le plateau. 

Sur place, pas envie de rester, du monde qui attend la fête nationale, des stands de bouffe... On a roulé après avoir englouti un melon, je m'endormais pendant qu'il conduisait. Téléphone en route, retour à la civilisation. 

Alex m'a déposé, on s'est posés, pris un rhum, sympa. J'ai sorti toutes mes affaires sales et détrempées, machine, douche, repos !

Peut-être 58h de marche en 8 jours, ressourcé ! Pas trop de douleurs, des chutes sur le chemin, dans la rivière, dans la boue, des plaies, le pouce de la main droite tordu, des orteils un peu cabossés, un dos fragilisé, mais rien par rapport aux deux autres années. Le bonheur, simple comme une balade dans les montagnes...

 

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