Yuichi et la lévitation du pantin famélique (1)
Yuichi et la lévitation du pantin famélique (1998)
Pourquoi avait-il fallu que je tombe sur ce livre ? Pourquoi m'être attardé sur ce marché aux livres de place Arnaud Bernard alors qu'un vent glacial poursuivait les rares promeneurs ? Je ne sais plus combien j'ai acheté ce livre mais peu importe puisqu'il occupe déjà une place à part ? Je n'arrive pas à l'ouvrir...
"Au fur et à mesure de ses visites, Yasuko se montrait si familière avec lui, qu'elle osait même parfois s'asseoir sur les genoux de Shunsuké, lorsqu'il se reposait sur une chaise longue de rotin, dans le jardin. Cela faisait plaisir à Shunsuké."
Pourquoi prétendre avoir oublié son prix ? Comment éviter cette étrange volute sur la couverture, signe annonçant l'infini de la littérature ? Comment négliger les autres textes de la collection "Du monde entier" ? J'entends encore le Transsibérien, le vieux moine de Novgorode, les envols des mains du poète, "avec des bruissements d'albatros", mais cessons.
"Yasuko s'asseyait sur les cuisses que Shunsuké avait étendues sur la chaise longue de rotin et qu'il avait enveloppées d'une couverture."
Il est là, lourd, "Kinjiki", sur mon bureau, sous les tonnes de rien, feuilles, réveil non remonté... Ne décrivons pas ces riens. Le bel nrf se planquait si habilement sous toutes ces couches, strates de l'inutile, de l'oubli et du temps. Comment rendre la conversion des choses en rien hormis par leur étymologie ?
Du monde entier, Les amours interdites, Yukio Mishima, roman traduit du japonais par René de Ceccaty et Ryoji Nakamura, la volute, nrf, Gallimard. Cohabitent plusieurs temps dans la première de couverture. Les passants passent ou s'arrêtent.
"C'était lourd. Shunsuké aurait voulu lancer une plaisanterie obscène, mais il se tut. Les stridulations sonores des cigales accentuaient ce silence."