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Sine linea
16 août 2020

d'été

Élégie d’été

(« l’écho seul fait choeur », Jacques Ellul)

 

 

je n’ai rien compris de ces jours d’été

et les coucher ici m’aidera peut-être

à démêler tous ces fils fous

 

pas de rimes pas de mètres

à peine des sens et des images

comme ces rêves imbriqués jusqu’aux matins

 

on a pris les chemins escarpés

j’étais chargé de toutes les angoisses

la bouche et le nez enfin libérés

 

j’ai noté les cols les montées les descentes

les orteils bleus les nuits fraîches

les moustiques sur les paupières

 

les amis sur le sentier

les vautours – vingt sur une carcasse de vache

leurs combats de bec et leur vol désordonné

 

l’ami disparu la nuit du refuge aux ronflements

le Valier à la place du deuxième Crabère

la tente gelée qui crisse au matin

 

les deux patous sous le refuge qui me chassaient

et l’un et l’autre loin des brebis et de mon chemin

la falaise impossible à franchir et la brume qui s’y accroche

 

le chemin entrevu enfin nommé « le chemin de la liberté »

je force la voie dans les nuages mon sac chute de cinquante mètres

son bruit quand il s’écrase et le silence ensuite

 

les chevaux noirs ont levé la tête

les brebis ont cherché qui avait chuté

puis tous ont brouté de plus belle

 

figé au coeur du rocher impossible de monter

impossible de descendre j’ai rampé sur le côté

pour retrouver les Z du chemin

 

impossible d’avancer après avoir tout ramassé

traverser quoi pour quoi jusqu’où

vivre jusqu’à quand pourquoi

 

les bergers m’ont pris en mains

de l’eau un café un téléphone

et le grand fou m’a accompagné jusqu’à la route

 

j’ai retrouvé les rues la ville les masques

et la famille ensuite comme si rien n’avait bougé

ni la rivière aux pieds ni les lettres du Scrabble

 

les mots des autres glissaient sur moi

les rubaïs de Nâzim Hikmet en écho de ceux de Khayyam

les folles projections de Liu Cixin aux manies d’Edogawa

 

et rien en moi ne s’engageait

aucune idée les mots enfouis

je n’étais bon qu’à regarder mes pieds dégonfler

 

la mer les bras l’océan j’y entre et en sors

sans que les gouttes restent sur ma peau

sans que les baisers s’encrent

 

la nuit tout s’emballe

je navigue entre les tranches des rêves

et je ne peux rien démêler sous la chaleur qui monte

 

j’ai toujours su qu’on ne s’appartenait pas

mais que tout file ainsi entre les doigts

sans valeur ni sens à ce point non c’est nouveau

 

pas une seule phrase qui monte aucun écho

à ravaler ma langue à la mâcher

comme un chewing-gum encore et encore

 

 

 

 

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Commentaires
C
T'inquiète, la poésie gagnera toujours, elle sera sous tes pas.
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A
moderne et nostalgique
Répondre
Sine linea
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