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Sine linea
7 janvier 2020

L'arbre à fric (Jour 41, 04/11/2019)

Lundi 4 novembre

 

    J’aimerais bien que tout ceci soit faux ! Plus j’écris ce qui se passe ces derniers jours, plus c’est dingue ! Je vais le jeter au feu ce carnet ! Chaque jour, je crois qu’on a atteint le fond et c’est chaque fois pire ! Je n’ai pas du tout envie de romancer tout ça. Je le fais en mode télégraphique pour me débarrasser et pour respecter mon ami mal en point :

- réveil tôt

- marche vers ce qu’on pense être le sud

- on cherche à bouffer, des champignons, des fruits

- Denis se fait mordre par un serpent complètement bariolé !!!

- il hurle

- son doigt est gonflé, bleu !

- il tombe dans les pommes !!

- putain !

- putain !

- putain !

- je le tapote tapote tape !

- on n’a rien bouffé presque, ça et la morsure, dans les vapes !

- il revient à lui, mon cœur cogne, je pleure

- je porte nos sacs, je le porte presque lui aussi

- on a marché tout droit sous les arbres deux heures

- pas trop conscient, dur d’avancer, des pauses

- je crie dans la forêt, help ! Personne !

- on entend un grondement irrégulier

- c’est ça, on s’approche d’une route

- eldorado !

- je l’assois sur les sacs et me mets en mode stop

     Marre d’écrire avec des tirets !

     On est pris au bout de trois heures. On est desséchés. On crève la dalle ! Le type, un brave gars, rasta, hallucine de nous voir dans cet état ! Je lui parle du serpent, ses couleurs, que mon pote était dans les pommes… Il me dit que ce n’est pas le pire des serpents, je n’ai pas bien compris le nom anglais de la bête. Il nous file des biscuits, les meilleurs du monde ! Il sort trois bières de sa glacière, on lampe sévère. La tête me tourne. Denis dort ensuite, j’ai peur quand il ferme les yeux. Ne pas dormir, rester conscient.

      Le type nous dépose à un centre médical complètement improbable, dans une petite ville Hoopa, je ne sais pas où on est ! « K’ima:w Medical Center » ! Le bâtiment ressemble à une ancienne pompe à essence et à une église bien barrée, style adventiste, toute blanche ! Et là-dedans, c’est une famille de je ne sais quels indiens, il y a plein de peintures et de photos, ils sont en tenues anciennes, des fourrures de bêtes, des plumes… Je recopie leur nom, incompréhensible ! « Na:tinixwe », dans la salle d’attente, la médecin et l’infirmière, deux femmes indiennes énormes ! m’ont dit d’attendre, de me calmer. J’ai pris un café et j’ai attendu, pas du tout serein. Et moins d’une demi-heure après, Denis est sorti encadré des deux mastodontes, tout sourire. D’après elle, il faut attendre quand même, mais elles pensent qu’il n’y a pas de venin, juste une morsure. Je ne comprends pas vu son doigt énorme et bleu ! Elles nous disent de rester dans le coin, qu’il faut qu’on revienne demain, voir le résultat de la prise de sang. On doit avoir l’air de clochards, parce que la cheffe indienne s’inquiète tout de suite de savoir si on a un endroit où dormir, de quoi manger… trois jours dans la forêt, on doit ressembler à deux vieux ours affamés, la peau sur les os ! On dit oui à tout, comment s’opposer à nos sauveurs indiens ! Et contre une morsure de serpents, qui serait mieux placé qu’eux ?!

 

     A la fin du service, on monte dans un énorme van avec les deux sœurs, chef et médecin de leur service si j’ai bien compris. Leur cousin est derrière nous dans un pick-up plus petit. Il semble se méfier de nos trognes. L’équipe s’arrête à un supermarché avant d’aller chez eux. Elles voulaient tout payer mais on s’est imposés. En voyant nos liasses, elles ont halluciné, je pense qu’elles se sont même demandé si on n’était pas des gangsters…

 

     Je n’en peux plus d’écrire ! Résumons : arrivés à un énorme camp de mobil-homes, présentations, que des indiens, enfin des blancs aussi sûrement, mais peu, on dîne, on boit, on raconte notre périple, ils se marrent, ils connaissent bien ce genre de galères. On nous attribue une petite caravane au fond du camp. On n’a qu’une bougie ridicule, je ne vois plus grand-chose. Denis est toujours aussi nerveux avec sa main gonflée. Moi je ne tiens plus debout.

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